mercredi 6 mars 2013

St Grégoire de Nysse


Biographie
Grégoire de Nysse est né » vers 331 d’une famille d’avocats et de rhéteurs chrétienne de dix enfants. Sa grande mère sainte Macrine l’Ancienne avait connu les enseignements de Grégoire le thaumaturge qu’elle transmit à ses enfants ; deux de ses enfants, saint Basile de Césarée, son ainé de cinq ans et saint pierre de Sébaste furent évêques comme lui. Sa mère Emmélie, une fois veuve et sa sœur, Sainte Macrine la jeune devinrent religieuse. Son père tenait une école de rhétorique à Néocésarée.Il bénéficie de la très forte influence de sa sœur Macrine et davantage encore de celle de son frère Basile qu’il appellera « un maitre et un père »
Il n’a pas reçu des études aussi complètes que son frère Basile de Césarée. Au sujet de ses études, Grégoire affirmera qu’il « n’a rien de sensationnel à en dire ».Son frère Basile faisait probablement partir de ses professeurs.
Grégoire se destina à la vie religieuse, et fut ordonné lecteur, mais il ne se jugera pas pour autant lié au service de l’Eglise. Après le retrait de la loi scolaire de l’empereur Julien en 365, il devient maitre de rhétorique. Il se maria avec Théosébia mais sa jeune femme mourut quelque temps plus tard. Grégoire déploiera plus tard de ne pas avoir choisi la virginité. Grégoire de Nazianze lui écrira en lui demandant d’avoir une vie plus fervente. Grégoire de Nysse aura une vie chrétienne et ira vivre avec les moines et il fait de longs séjours au monastère de Iris de Basile.
En 371, Grégoire de Nysse fut nommé évêque de Nysse, contre son gré, par Basile de Césarée. Lui qui n’aspirait qu’à la vie spirituelle et intellectuelle se montra inapte à toute politique ecclésiastique ; on lui reprocha son manque de fermeté et les inexactitudes de sa comptabilité. Quelques années après sa nomination en 374, un synode d’évêques ariens opposés à la doctrine de Nicée défendue par Grégoire et Basile de Césarée, le dépose, en affirmant qu’il avait dilapidé les biens de l’évêché. L’empereur Valens favorisant l’arianisme, Grégoire partit alors en exils.
Après la mort de Valens, Grégoire reçu un accueil chaleureux dans son diocèse. Il participa au Concile d’Antioche en 379, afin de mettre fin au schisme qui divisait la région d’Antioche. Il fut alors chargé par des évêques du synode d’une mission en Arabie. En 380, il fut nommé archevêque de Sébaste.
Après la mort de Basile, en 379, Grégoire de Nysse vit son rôle augmenter et deviendra l’homme de confiance du régime impérial de Théodose le Grand. Il joue un rôle de première importance au Concile de Constantinople en 381, convoqué contre l’arianisme. Ce concile compléta la profession de foi de Nicée. C’est lui qui prononça l’éloge funèbre de mélèce premier d’Antioche, mort durant le concile et défendra la Nature divine de l’Esprit Saint. Il est désigné par Théodose comme l’un des prélats dont il faut partager la foi pour être orthodoxe. On fixe la date de sa mort vers 394.
La pensée de Grégoire de Nysse est plus pénétrante que celle de Basile de Césarée et de Grégoire de Nazianze. Les écrits de Grégoire en Grec, sont nombreux et variés. Le discours catéchétique s’adresse aux catéchistes et traite des questions de la foi contestées par les hérétiques. La formulation de la foi, comme toujours se précise dans la controverse.
Il a en outre commenté dans des homélies divers passages bibliques, notamment l’Ecclésiastiques, cantique des cantiques et les béatitudes. La datation des œuvres est extrêmement difficile, car on a trop peu de détail sur sa vie. Mais la plus grande partie de son œuvre fut écrite après la mort de basile.
Autre les sources théologiques, nous pouvons aussi citer trois sources profanes qui eurent une certaine influence, au moins dans leur style, sur la doctrine de Grégoire de Nysse ce sont : Platon, Plotin et les stoïciens. Il faut faire une mention spéciale de Plotin (205-270), philosophe mystique néo-platonicien. La dépendance littéraire de Grégoire envers lui est évidente.
Cependant cette influence doit être mitigée : nous assistons dans son œuvre à une entière transformation du platonisme comme néoplatonisme de Plotin. L’influence plotinienne, bien plus qu’une influence réelle dans la doctrine consiste plutôt en «  d’expression ».La nouveauté du Christianisme, dans la recherche d’une formulation adéquate, se voit obligée d’acquérir la maîtrise de ce langage philosophique profane, mais en modifiant considérablement le sens.




CONTEXE
Après la période des débuts du grand siècle, où nous avons vu naître l’arianisme, nous arrivons à une période riche en très grands écrivains de haute culture intellectuelle, tant à l’Orient qu’en Occident.
            Au IV° siècle, l’empire tend en effet, à se diviser de plus en plus et cela aura des conséquences non seulement dans l’ordre politique, mais aussi dans l’ordre religieux étant donné l’emprise qu’ont les empereurs dans l’Eglise.
            En ce qui concerne la doctrine, les Centres d’intérêts ne sont plus les mêmes en Orient et en Occident : l’arianisme ouvre le feu en Orient, et les Cappadociens ont eu une part prépondérante dans l’apaisement de l’incendie ; Saint Augustin, en Occident, n’en recueillera que les retombées. Mais il devra faire front contre d’autres controverses propres à l’Afrique comme le donatisme, ou qui auront leur origine en Occident comme le pélagianisme. A cette époque aussi, les premières controverses christologiques s’amorcent en Orient, à Antioche, mais ce ne sera que durant la période suivante, que Nestorius osera attaquer la maternité divine de Marie. C’est bien donc la question trinitaire qui occupe l’Orient chrétien du IV° siècle.
            Au milieu de ce siècle, la crise arienne bat son plein. Pour la combattre l’Esprit suscite en Cappadoce trois grands théologiens : Basile de Césarée, son ami Grégoire de Nazianze et son frère Grégoire de Nysse ; connus sous le nom des « trois Cappadociens ». Ils vont poursuivre l’œuvre théologique d’Athanase, l’amenant à sa perfection, et assurer à la fin de leur vie, la ruine de l’arianisme et la victoire éclatante de la foi de Nicée. Notre recherche portera sur le traité de Grégoire de Nysse intitulé la création de l’homme.
            Voulant ainsi compléter les homélies sur l’Hexameron de son frère Basile qui n’a pas eu le temps de traiter de la création de l’homme et faisant cadeau de Pâques à son frère Pierre, Grégoire de Nysse consacre à ce sujet le présent traité : il y  présente l’homme comme le sommet et le couronnement de la création.
Appelé à dominer le monde, l’homme se révèle par de nombreux traits, supérieur à l’animal, particulièrement par son aptitude au langage. Cette disposition témoigne du mystère de sa nature où l’Esprit et le corps sont tellement unis qu’il est impossible de localiser précisément la faculté directrice de l’âme dans le corps.
Ultimement, ce qui définit la grandeur de l’homme c’est qu’il a été créé à l’image de Dieu. Grégoire décrit alors en quoi consiste cette ressemblance.

I-                   L’homme comme maître de la création.
Après avoir montré la disposition de la création cosmique où Dieu l’a disposée de telle sorte que l’homme trouve tout ce dont il aura besoin pour survivre et pour organiser ses activités. Ainsi la création de la Nature précède celle de l’homme non pour diminuer ou anéantir la valeur de l’homme mais plutôt pour lui accorder tout pouvoir sur les autres créatures. Grégoire nous l’exprime en ces termes : « L’homme est amené le dernier dans la création, non qu’il soit relégué avec mépris au dernier rang, mais parce que dès sa naissance, il convenait qu’il fut roi de son domaine ».
Par sa création « l’image de Dieu », l’homme est ordonné à la possession des biens divins. A l’origine de la création de l’homme, il y’a l’amour de Dieu qui désire communiquer ses biens à d’autres. Pour cela, il faut qu’il y ait une certaine connaturalité de l’âme avec Dieu, qui la rende capable de connaître et de désirer les biens divins pour y participer. En vue de cette formation de l’homme, un plan est d’abord établi par le créateur pour déterminer l’être à venir, sa nature, l’archétype dont il portera la ressemblance, sa fin, son genre d’activité et l’exercice de son pouvoir : Tout cela se résume à travers ces paroles de Dieu. « Faisons l’homme à notre image et ressemblance ; qu’il commande aux poissons de la mer, aux bêtes de la terre, aux oiseaux des cieux, aux animaux et à toute la terre ».
En effet, cette création d’un être fini à l’image et à la ressemblance d’un Dieu infini implique une ontologie dynamique. L’homme est conçu de manière dynamique, c’est un être de désir, une capacité croissant éternellement à mesure même qu’elle est comblée, en sorte qu’il puisse y avoir à la fois rassasiement et désir, repos et mouvement.
II L’homme apte au langage
De par sa stature, l’homme est apte au commandement et est doté d’un pouvoir royal. Telle est la dignité humaine par rapport aux animaux. Cette attitude de commandement de l’homme apparait clairement dans la finalité des mains qui ont une aide particulière pour le besoin du langage : «Puisque l’homme était un vivant apte à la parole, il fallait que l’instrument de son corps fut construit en rapport avec les besoins du langage » .


Certes les hommes utilisent les mains pour d’autres fins aussi mais leur destination première est le langage. Leur existence a fait que la stature de l’homme est autre que celle de l’animale. Il convient de souligner que pour Grégoire l’âme humaine regroupe ou récapitule les trois degrés de l’âme : l’âme naturelle, l’âme sensitive et l’âme intellectuelle ou spirituelle. Autrement dit Grégoire garde les grandes lignes de l’anthropologie d’Origène : l’homme est corps, âme et Esprit.
III- La nature humaine est un mystère
Nous sommes ici au cœur de la pensée de Grégoire. L’esprit crée est un infini en perpétuel progrès, tandis que Dieu est un infini en acte et la matière est purement finie.
La relation de création s’exprime ainsi dans le fait que l’esprit reçoit perpétuellement de Dieu l’accroissement à l’être. Donc cette relation est une relation actuelle : l’Esprit est continuellement créé. Une conséquence de cette relation sera si Dieu est essentiellement don, l’esprit créé, lui, est accueil dans la mesure où il est tourné vers Dieu et où il se reçoit de lui, que l’homme existe pleinement et ratifie librement son être. Cette affirmation de Grégoire tire son origine de 1co2, 10-12 : « car c’est à nous que Dieu  l’a révélé par l’Esprit ; l’Esprit en effet scrute tout, jusqu’aux profondeurs divines. Qui donc chez les hommes connaît les secrets de l’homme, sinon l’esprit de l’Homme qui est en lu ? De même nul ne connaît les secrets de Dieu, sinon l’Esprit de Dieu. Or nous n’avons pas reçu, nous l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu, afin de connaître les dons que Dieu nous a faits ».
Ainsi, Grégoire exprime merveilleusement l’unité trinitaire en faisant une comparaison entre l’Esprit divin et l’esprit humain : « celui qui est vu inséparablement dans l’un, est un dans toute vérité, et il est premier dans le premier, et unique dans l’unique. Car tout comme l’esprit de l’homme qui est en lui et l’homme lui-même sont un seul homme, ainsi aussi l’Esprit de Dieu est en lui et Dieu lui-même seront appelés à proprement parler, le Dieu un, premier et unique, l’Esprit ne pouvant être séparé de celui en qui il est ». Grégoire explique cette comparaison en faisant recours à cette Parole de Dieu : «  faisons l’homme à notre image et ressemblance ». L’homme n’est vraiment image dans la mesure où il possède tous les attributs de cette image. Et donc s’il se détourne de cette image, sa croissance s’arrête et il devient nature.    

IV- L’homme créé à l’image de Dieu
Cette affinité avec le divin mêlée à la nature humaine la ressemblance avec Dieu est donc constituée par les biens de la grâce : la pureté, la béatitude, l’innocence, vertus qui sont, comme chez Origène, une participation à la vie du Christ. Ce mot « vertu » n’est pas à entendre dans le sens moral, mais au sens ontologique : c’est l’écoulement de la vie divine dans l’âme. Ces vertus donnent à l’homme une ressemblance avec Dieu et une certaine parenté grâce à cette parenté, l’âme peut jouir de Dieu qui est sa fin, par la connaissance et l’amour.
Dans la connaissance, l’âme contemple Dieu dans le miroir de la nature divine que constitue en elle la vie de la grâce, la pureté. C’est alors à travers la vie de la grâce qui est en elle que l’âme expérimente la présence de Dieu qui est le principe de sa divinisation. Toutefois il faut signaler que ceci n’est pas en contradiction avec l’autre affirmation de Grégoire qui dit : « l’essence de Dieu est toujours inaccessible » ; car cette connaissance bien qu’elle nous rapproche de Dieu, laisse cependant son essence toujours mystérieuse.
Dans l’amour c’est la présence de Dieu qui est saisie, l’expression de la forme suprême de l’union à Dieu. Ce primat de l’Amour est lié à sa doctrine de la transcendance absolue de Dieu. Si la vision de l’essence divine est à jamais inaccessible, l’amour qui atteint Dieu dans cette essence, telle qu’elle est en elle-même, dépasse toujours la connaissance qui ne l’atteint que dans un miroir.
L’homme a donc été créé par Dieu à son image de façon à lui être uni par la connaissance et par l’amour. Mieux encore, il faut dire qu’entre la connaissance et l’amour, il y a une causalité réciproque : c’est parce que l’âme connaît Dieu qu’elle l’aime et parce que l’âme aime Dieu qu’elle désire de s’unir à lui et que Dieu lui communique cette participation de sa vie dans laquelle elle connaît. Mais cette connaissance n’égalant jamais l’infinité de la nature divine, l’amour de l’âme dépasse toujours la connaissance qu’elle a de Dieu et l’ouvre à une connaissance nouvelle.
           


Conclusion : le rapport entre l’homme et la nature ; la crise écologique.
Dieu pouvait être perçu comme favorable et bienveillant pour l’homme, il lui avait délégué sa part de souveraineté et de sa maîtrise du cosmos. Ainsi l’homme pouvait s’instituer gestionnaire de la nature et de ses potentialités.
La maîtrise exercée par l’homme sur la nature l’a mis en position d’en exploiter les ressources. Il en a assurément résulté un bien être accru et de meilleures conditions d’existence. Mais il convient de souligner d’une part que cette maîtrise de la nature et la participation à ses fruits n’étaient pas également réparties entre tous les hommes ; d’autre part, l’exploitation systématique des ressources naturelles entraînait des dépenses considérables d’énergie et de matières premières, portait atteinte au paysage, au sol, à la mer, à l’espace et à l’homme lui-même.
Aussi nous paraphrasons Monseigneur José DORE, qui nous donne des propositions pour mieux entrer en contacte avec la nature : l’homme doit désormais accepter de cultiver à l’égard de la nature une attitude fondamentale de mesure et de respect ;  parce que la nature est là avant lui, comme autre que lui ; et qu’elle représente pour lui un « donné » gratuit dont il n’est aucunement propriétaire.
                                              

                                               Sources
1* Grégoire de Nysse, Création de l’homme (chap. I – chap. XI)
2*Bernard Pottier, Dieu et le Christ selon Grégoire de Nysse ; éd. Culture et vérité,       Bruxelles, 1994, 523p.
DORE J., l’homme devant, dans, contre, avec la nature. Les réflexions écologiques d’un théologien, in A .R .M.   
           




St Ignace d'Antioche


Introduction
Dans chaque Institution, nous trouvons une structure bien établie pour la bonne marche et conduite de ses sujets. C’est dans ce sens que l’Eglise depuis ses origines commença à s’organiser hiérarchiquement afin d’aboutir à sa fin ultime qui est la glorification du Père et la sanctification de l’homme. La hiérarchisation de l’Eglise fût évolutive dans la mesure où il n’y a pas au départ des textes institutionnels qui établissaient des critères de choix pour ses dirigeants. Ceux-ci étaient d’abord les Apôtres qui furent les témoins authentiques de l’annonce de l’Evangile, puis leurs successeurs cités d’une manière peu exhaustive : les évêques, les presbytres, et les diacres. C’est dans cette mouvance que Saint Ignace d’Antioche  établit le fondement de l’unité de l’Eglise autour de l’évêque, de ses presbytres et de ses diacres qui sont les représentants de Dieu sur terre. Cette conception d’Ignace nous permettra de parcourir ses Lettres pour desceller l’importance de l’évêque pour le fonctionnement de l’unité dans l’Eglise.           
     I/ BIO-BIBLIOGRAPHIE DE SAINT IGNACE[1]
Ignace, second évêque d’Antioche après Saint Pierre, personnalité d’une valeur incomparable, fût condamné  à mort sous le règne de Trajan (98-117) qui a commencé la persécution au début du 2°siècle. Il persécutait les chrétiens pour le simple fait qu’ils portaient le nom de chrétien (Propter Nomen). C’est sous Trajan qu’est apparu pour la première fois un texte qui réglementa les persécutions par l’intervention d’un Gouverneur Juriste du nom de Pline le Jeune qui a écrit à l’empereur de ne pas condamner les chrétiens sans motifs. Ainsi Trajan répondit par un rescrit (115/117) en soulignant ceci :
-          Il ne faut pas poursuivre d’office les chrétiens.
-          Mais s’ils sont déferrés, il faut les interroger.
-          S’ils persistent dans leur foi, il faut les châtier ; par contre s’ils se rétractent, il faut les libérer.
C’est ainsi que Trajan a réglementé la procédure criminelle contre les chrétiens. Ignace fût conduit de la Syrie à Rome pour subir le martyr. En chemin vers son calvaire il fût la première partie de sa  route à pied et s’arrêta en particulier à Philadelphie, à Smyrne et Troas où il fût accueilli avec affection et respect. De Smyrne il écrit aux Eglises d’Ephèse, de Magnésie, de Tralles, qui lui avaient envoyé des messagers pour le saluer. De Troas enfin il adressa des lettres aux Eglises de Philadelphie et de Smyrne, ainsi qu’à Polycarpe, le jeune évêque de cette ville ; il écrit aussi aux romains. Traversant la Macédoine, il passa par mer en Italie. A Rome, il subit le martyr vers 107ou 110.
Ces sept Lettres, écrites au cours d’un voyage, sont cependant le document le plus riche et aussi le plus émouvant qui nous soit resté de la période postapostolique. Rien de prémédité, aucun plan, remerciements, encouragements, réprimandes, conseils, nouvelles personnelles, s’y mêlent sans aucun ordre apparent. Mais en même temps que le témoignage vibrant d’une foi sans faille et d’un Amour fervent pour Jésus Christ, nous y trouvons aussi des renseignements sur la foi et sur la vie de l’Eglise, ses développements et ses problèmes au début du 2°siècle ; où le christianisme était considérée comme une religion illicite. C’est une période pendant laquelle, naît de grands courants hérétiques qui se confrontaient à la doctrine chrétienne. Ainsi deux problèmes se pointent devant les chrétiens : vivre les persécutions et défendre la doctrine.
Les Eglises d’Asie sont tentées de retourner au Judaïsme. Ignace leur rappelle la nouveauté du christianisme qui s’incarne sans doute dans la loi, mais qui la dépasse. C’est pour autant dire que la loi n’est plus le respect du sabbat, mais elle est l’actualisation du « jour du Seigneur Ressuscité » (magn.X-XI). Notre auteur choqué par ce qu’on appelait le docétisme, cette tendance qui va sous - estimer, voire nier la réalité de la chair du Christ, qui n’aurait souffert qu’en apparence. Ignace réagit vivement contre cette erreur dangereuse qui mettait en péril la réalité de l’incarnation de notre Salut ; et rend inutiles les souffrances du martyr : « soyez donc sourds quand on vous parle d’autre chose que de Jésus Christ, de la race de David, Fils de Marie, qui est véritablement né, qui a mangé et qui a bu, qui a été véritablement persécuté, sous Ponce Pilate, qui a été véritablement crucifié et mort, au regard du ciel, de la terre et des enfers, qui est aussi véritablement ressuscité d’entre les morts… »[2]. Ainsi Ignace professe le fondement de la foi chrétienne en Jésus Christ vrai Dieu et vrai homme.
Egalement à Corinthe au temps de Saint Paul et de Saint Clément de Rome, les Eglises d’Asie sont aussi menacées par les querelles et les divisions. Ignace s’oppose catégoriquement à toute menace de schisme. Il est le prédicateur de l’unité. Il précise ainsi que l’unité de l’Eglise se fait autour de l’évêque, entouré de son presbytre et de ses diacres. C’est dans ce sens que Ignace affirme : « de même que le Seigneur n’a rien fait, ni par lui-même, ni par ses apôtres, sans son Père (cf. Jn5, 19-30), avec qui il est un, ainsi vous non plus ne faites rien sans l’évêque et ses presbytres »[3]. L’unité de la communauté autour de l’évêque est signifiée et réalisée dans l’Eucharistie, chair véritable du Christ : « ayez donc soin de ne participer qu’à une seule chair de notre Seigneur Jésus Christ, et un seul calice pour nous unir en son sang, un seul autel, comme un seul évêque avec le presbyterium et les diacres, mes compagnons de service : ainsi tout ce que vous ferez, vous le ferez selon Dieu ».[4]
De surcroit les Eglises locales unies entre elles par le lien de la charité et de la communion ne sont qu’une seule Eglise : « l’Eglise catholique ».
II/ Les différents rôles de l’évêque
Les lettres de Saint Ignace reflètent aussi un vivant tableau de la dignité hiérarchique et les prestiges qui entourent un évêque au milieu de son troupeau. Pour qu’une communauté soit appelée comme telle, il faut qu’elle ait comme dirigeant un évêque qui préside en qualité de « Représentant de Dieu », entouré de ses prêtres et de ses diacres.
II-1- L’évêque, Pasteur plus que chef
    L’évêque est, avant tout, le maître qui doit répondre aux attentes des fidèles. Etre en communion avec lui, c’est se préserver de l’erreur et de l’hérésie. Sa lettre aux Tralliens nous le montre avec conviction : « je vous exhorte donc, non pas moi, mais la charité de Jésus Christ, à n’user que de la nourriture chrétienne, et à vous abstenir de toute plante étrangère qui est l’hérésie. Ce sont des gens qui entremêlent Jésus Christ à leurs propres erreurs en cherchant à se faire passer pour dignes de foi, comme ceux qui donnent un poison mortel avec du vin mêlé de miel, et celui qui ne sait pas le prend avec plaisir, mais dans ce plaisir néfaste, il absorbe la mort »[5]. Cette exhortation d’Ignace nous montre que le chrétien doit avoir une base de spiritualité solide, une nourriture quotidienne qui lui permettra de résister et de combattre contre les hérétiques qui incarnent la mauvaise doctrine et conduisent alors à la mort. Ici  Ignace emploie le langage de son époque dans la mesure où il voit les hérétiques comme des gens trompeurs.
Aussi l’évêque exhorte-t-il constamment son troupeau à la paix et à l’unité qui ne se manifestent, qui ne s’accomplissent que par la solidarité avec la hiérarchie. Saint Ignace nous le confirme par cette affirmation : « il convient de marcher d’accord avec la pensée de votre évêque, ce que d’ailleurs vous faites. Votre presbyterium est justement réputé digne de Dieu, est accordé à l’évêque comme les codes de la cithare(…) que chacun de vous aussi, vous devenez un chœur afin que dans l’harmonie de votre accord, prenant le ton de Dieu dans l’unité, vous chantez d’une seule voix par Jésus Christ un hymne au Père afin qu’il vous écoute et vous reconnaisse, par vos bonnes œuvres, comme les membres de son Fils. Il est utile pour vous d’être dans une inséparable unité, afin de participer toujours à Dieu »[6].
       Avoir le service de pasteur ne signifie pas en premier lieu pour l’évêque, avoir des capacités et des talents humains. Mais il doit avoir la pleine conscience que son autorité lui vient de Dieu, Saint Luc dans son évangile nous montre cette mission que le Christ a donnée à ses disciples : « qui vous écoute M’écoute, qui vous rejette Me rejette, et qui Me rejette, rejette Celui qui M’a envoyé »[7]. Ainsi la communauté doit regarder l’évêque comme le Seigneur lui-même (Eph.VI) dans la mesure où il est l’envoyé et le représentant de Dieu. De cette manière l’évêque apparait comme le garant de la communauté, c’est lui qui doit nourrir le peuple de la Parole de Vérité, de le protéger des malfaiteurs, des « hommes à la ruse perverse » qui porte un enseignement trompeur de la doctrine de Dieu.
N’y-a-t-il pas là un grand péril ? La tentation d’orgueil et de domination n’est-elle pas à l’affut au détour du chemin pour faire trébucher les pasteurs ? Et comment concilier tout cela avec le réflexe démocratique sans cesse croissant à notre époque ?
    Le pasteur ne peut pas ignorer tous les versets bibliques à l’endroit des mauvais bergers qui se paissent eux-mêmes ; comme à l’endroit des mercenaires qui n’aiment pas leurs brebis. L’Ecriture doit donc le porter à prendre garde. En outre, la communauté, elle aussi se chargera de lui rappeler son devoir de modestie et de disponibilité.
   Enfin il y a la souffrance (poids) liée à toute charge de direction, à toute responsabilité qui doit nous orienter vers l’humilité. C’est dans ce cadre que Saint Ignace tente d’orienter Polycarpe : « que ceux qui paraissent dignes de foi et qui enseignent l’erreur ne t’effraient pas. Tiens ferme comme l’enclume sous le marteau. C’est de grand athlète de se laisser meurtrir de coups, et de vaincre. C’est à cause de Dieu que nous devons tout supporter, afin que lui-même nous supporte »[8]. Par ailleurs, en insistant sur l’humilité, Ignace adresse ces mots à Polycarpe : « justifie ta dignité épiscopale par une entière sollicitude de chaire et d’esprit ; préconise toi de l’union, au dessus de laquelle il n’y a rien de meilleur. Porte avec patience tous les frères comme le Seigneur te porte toi-même. Supporte les tous avec charité(…) »[9].
Seul le regard de la foi, qu’il soit du côté de l’évêque ou du côté de la communauté, surtout est capable de voir le pasteur tel qu’il est : un homme de Dieu, quelques soient ses lacunes, ses défauts, ses péchés, sa race, sa tribu, son âge. Ignace nous l’affirme par cette exhortation adressée à la communauté de Smyrne qui est à la direction d’un jeune évêque : « et vous il convient de ne pas profiter de l’âge de votre évêque, mais par égard à la puissance de Dieu le Père, lui accorder toute vénération ; je sais en effet que vos saints presbytres n’ont pas abusé de la jeunesse qui paraît en lui, mais comme des gens sensés en Dieu, ils se soumettent à lui, non pas lui mais au Père de Jésus Christ, à l’évêque de tous… »[10].
 II-2/ L’évêque comme grand – prêtre de la liturgie.
       L’évêque est aussi, pour Ignace, le grand – prêtre de la liturgie et dispensateur des mystères de Dieu. En dehors de lui, on  ne peut administrer aucun sacrement surtout celui de l’Eucharistie : « il n’est pas permis en dehors de l’évêque ni de baptiser, ni de faire l’agapè, mais tout ce qu’il approuve, cela est agréable à Dieu aussi. Ainsi tout ce qui se fait sera sûr et légitime »[11]. Par la prédication, le pasteur apporte des paroles de vie aux hommes. Ainsi une source se met à jaillir, qui devient courant généreux dans les sacrements. Le pasteur en administrant le sacrement qui a pour source le Christ, sanctifie l’homme et glorifie Dieu. C’est Lui qui baptise, qui donne à manger son corps, qui accorde le pardon etc. L’évêque devient ainsi  canal et instrument du Christ au milieu des hommes. C’est pourquoi,  selon Ignace, la célébration des sacrements et l’organisation de toute activité concernant la communauté ne peuvent être faites sans la présence ou l’accord de l’évêque : « que personne ne fasse en dehors de l’évêque rien de ce qui regarde l’Eglise. Que cette Eucharistie soit seule regardée comme légitime qui se fait sous la présidence de l’évêque ou de celui qu’il en aura chargé ».[12] Autrement dit celui qui aura organisé un rassemblement sans l’autorisation de l’évêque cherche à créer un schisme, une démarcation et donc il s’éloigne de l’Eglise et de celui qui aura agi dans ce sens est considéré comme exclu et donc indigne de participer au repas du Seigneur. Ignace nous l’affirme avec clarté : « celui qui est à l’intérieur du sanctuaire est pur, mais celui qui est en dehors du sanctuaire n’est pas pur ; c’est-à-dire celui qui agit en dehors de l’évêque, du presbyterium et des diacres, celui-là n’est pas pur de conscience »[13]. Le pasteur exerce ainsi le pouvoir de sanctifier dans la liturgie. En effet, « Tous les sacrements, dans lesquels le pasteur exerce son pouvoir, tous les ministères ecclésiaux et les tâches apostoliques sont tous liés et ordonnés à l’Eucharistie ».[14]  Ainsi la liturgie est l’œuvre principale des pasteurs et l’Eucharistie est l’œuvre par excellence. C’est dans l’Eucharistie qu’Ignace reconnaît l’unité de l’Eglise. L’Eucharistie qui est source de l’unité de l’Eglise s’effectue par une bonne organisation hiérarchique des acteurs liturgiques, afin, qu’apparaisse aux yeux des non croyants, le témoignage des enfants, des «  porteurs » de Dieu. C’est dans cette ordre d’idée que le Concile Vatican II a définit l’Eucharistie comme le « Banquet de la communion fraternelle », quand il dit que les chrétiens en se nourrissant du Corps du Christ dans la communion, ils démontrent au monde, l’unité du peuple de Dieu. Dans la célébration de l’Eucharistie il y a toujours un principe d’unité et de charité. Cette célébration devient ainsi un moment particulier pour favoriser la communion entre les fidèles. A ce moment là il n’y a plus de distance entre nous, il n’y a plus ni rancune ni rivalité, nous expérimentons l’union du Christ avec son Père.  C’est avec la conception de  l’Eucharistie comme sacrifice du Christ qu’Ignace a orienté son martyr. L’évêque doit être capable et prêt à donner sa vie pour son troupeau et par amour pour Christ.




En définitive, nous avons parcouru les lettres de Saint Ignace d’Antioche par un regard panoramique qui nous a permis de voir non seulement les figures de l’évêque mais aussi de voir la lutte interminable de l’Eglise catholique contre les séparations (schismes) et surtout contre les hérésies. Nous n’avons certes pas souligné l’importance accordée à l’Eglise de Rome, mais nous reconnaissons même jusqu’aujourd’hui que l’Eglise de Rome est le signe et le détenteur de notre unité et de notre charité. L’évêque de Rome est, pour nous, la figure par excellence qu’Ignace a essayée d’installer ou d’orienter à son époque. L’évêque doit promouvoir l’unité, c’est pourquoi la lutte interminable de notre époque est de chercher et d’établir non seulement l’unité des catholiques mais aussi l’unité de tous les chrétiens. Cette démarche permet à l’Eglise catholique de bien établir sa doctrine et de bien éclairer sa position par rapport aux autres confessions religieuses. Sur ce, une question surgie : les schismes et les hérésies ne sont-ils pas des pistes d’enrichissement pour la proclamation de notre foi ? Autrement dit ne fallait-il pas des séparations et des hérésies pour que l’Eglise puisse atteindre son apogée ?    














                                                                  
                                                      Sources
 Ignace d’Antioche, lettres aux églises, trad. P. Th.Camelot, o.p, CERF, Paris, 1975, 113p.
J. Quasten, INITIATION AUX PERES DE L’EGLISE, tome I, CERF, Paris 1955, 410p.
Card. Godfried Danneels, MESSAGERS DE LA JOIE, Bruges, Bruxelles, 48p
Gerard de Servingy, LA THEOLOGIE DE L’EUCHARISTIE DANS LE CONCILE VATICAN II, Pierre TEQUI, Paris, 2000, 190p.


[1] Cf. les Lettres aux Eglises, Ignace d’Antioche
[2] Trall. IX
[3]  Magn.VII
[4]  Phila.IV
[5]  Trall.VI, 1-2.
[6]  Eph.IV
[7]  Cf. Luc 10,16
[8]  Poly. III, 1-2.
[9]  Idem. I, 2.
[10] Magn. III, 1.
[11]  Smyr. VIII, 2
[12] Ibidem
[13] Trall.VII, 2.
[14] Presbyterorum Ordinis n°5 

Droit canon II


                                        Introduction 

La mission de salut que le seigneur confia aux apôtres durera jusqu’à la fin du monde (Mt28, 18-20).Pour que cette mission puisse être accomplie selon la volonté du Christ, les Apôtres eux –même ont pris soin d’instituer des successeurs. Les évêques en vertu d’une institution divine, ont pris par succession la place des Apôtres, comme pasteurs de l’Eglise.      En effet, pour accomplir leur ministère pastoral, les Apôtres ont été comblés par le Christ de dons par une effusion spéciale de l’Esprit Saint descendant sur eux et ont transmis eux –mêmes à leurs collaborateurs, par l’imposition des mains, le don de l’Esprit saint qui s’est transmis jusqu’à nos jours dans la consécration épiscopale (L.G n°21).
Ainsi, les évêques tous ensemble ont reçu du Christ le mandat d’annoncer l’Evangile sur la terre entière, et pour cela, ils sont tenus d’avoir de la sollicitude pour toute l’Eglise, de même que, pour accomplir la mission qui leur a été confiée par le Seigneur, ils sont tenus de collaborer entre eux et avec le successeur de Pierre, en qui est institué « le principe et le fondement perpétuel et visible de l’unité de foi et de communion »[1].
A son tour, chaque évêque en collaboration avec son presbyterium est le principe et le fondement de l’unité dans son Eglise particulière ;excepté le pouvoir d’institution divine que l’évêque a dans son Eglise particulière, la conscience de faire parlée d’un corps non divisé a amené les évêques, au long de l’histoire de l’Eglise à employer dans l’accomplissement de leur mission des instruments, des organismes ou des moyens de communication qui manifestent leur communion et leur solitude pour les Eglises et qui constituent la vie même du collège des Apôtres :la collaboration pastorale, les consultations, l’aide mutuelle etc..
 C’est ainsi que le travail qui nous est demandé consiste tout d’abord à parler de la conférence des évêques, ensuite nous aborderons l’organisation interne des Eglises particulières dans sa totalité excepté les chapitres des chanoines et les recteurs d’Eglises et les Chapelains.
I.                   La conférence des Evêques

Depuis les premiers siècles, cette réalité de la communion a trouvé une expression particulièrement appropriée et caractéristique dans la célébration des conciles, outre les conciles œcuméniques, qui commencèrent avec celui de Nicée en 325,il faut mentionner aussi les conciles particuliers, pléniers ou provinciaux, qui furent célébrer fréquemment dans toute l’Eglise dès le deuxième siècle.
A côté de la tradition des conciles particuliers et en harmonie avec elle, à partir du dix neuvième siècle, pour des raisons historiques, culturelles, sociologiques et pour des objectifs pastoraux précis, sont nées dans différents pays les conférences des évêques, pour traiter les diverses questions ecclésiales d’intérêt commun et pour apporter des solutions opportunes. Ces conférences à la différence des conciles, ont eu un caractère stable et permanent.
Le concile Vatican II, dans le décret « Christus Dominus », non seulement souhaite que la vénérable institution des conciles particuliers retrouve une nouvelle vigueur (cf. n°36),mais traite aussi expressément des conférences des évêques, faisant apparaitre leur existence dans de nombreuses nations et établissant des normes particulières en ce qui les  concerne (Cf. 37-38).
En effet le concile a reconnu l’opportunité et la fécondité de tel organismes, estimant « qu’il est opportun au plus haut point qui pourtant dans le monde les évêques d’un même pays ou d’une même région se rencontrent dans le cadre d’une seule assemblée, sa réunissant à des dates fixes pour mettre en commun les lumières de leur prudence et de leur expérience afin que par l’échange des idées se réalise une sainte harmonie de forces en vue de bien commun des Eglises »[2].
C’est dans cet ordre d’idées que le code de droit canonique au canon 447 souligne que : «la conférence des évêques, institution à caractère permanent, est la réunion des évêques d’une nation ou d’un territoire donné, exerçant ensemble certaines charges pastorales pour les fidèles de son territoire, afin de mieux promouvoir le bien que l’Eglise offre aux hommes, surtout pour les formes et moyens d’apostolat adaptés de façon appropriée aux circonstances de temps et de lieux, selon le droit »[3].
Le code de droit canonique a établi des normes spécifiques (can 447-459), par lesquelles sont définies les finalités et les compétences des conférences des évêques, de même que leur érection, leur composition et leur fonctionnement.
1)      Les finalités Pastorales
La finalité des conférences des évêques consiste à veiller au bien commun des Eglises particulières d’un territoire grâce à la collaboration des pasteurs sacrés à qui la charge en a été confié à promouvoir le bien des fidèles.
2)      Compétences
Notre époque, la nécessité de la convergence des forces, fruit des échanges de sagesse et d’expérience au sein de la conférence épiscopale, a bien été mise en évidence par le concile, car « il n’est pas rare que les évêques ne puissent pas accomplir leur charge de façon convenable et fructueuse, s’ils ne mènent pas en accord avec les autres évêques une action de plus en plus étroitement concertée et ordonnée »[4].
 Il parait difficile d’établir avec exactitude une liste des actions sujets qui supposent cette coopération, néamoins il n’échappe à personne que la promotion et la sauvegarde de la foi et des mœurs la traduction des livres liturgiques, la promotion et la formation des vocations sacerdotales, la mise au point d’instruments pour la catéchèse, la promotion et le soutien des universités catholiques et d’autres institutions d’éducation, l’engagement œcuménique, les relations avec les autorités civiles, la défense de la vie humaine, de la paix, des droits humains, la justice sociale etc..Sont des sujets qui invitent actuellement à une action conjointe des évêques.
3)      L’érection des conférences
Les conférences épiscopales sont normalement nationales, c’est –à-dire qu’elles comprennent les évêques d’un seul pays. Canon 448, parce que  les liens de culture, de traditions et d’histoire communes, ainsi que l’entrecroisement des rapports sociaux entre les citoyens d’un même pays, demandent une collaboration des membres de l’épiscopat de ce territoire beaucoup plus continue que ne pourraient l’exiger les conditions ecclésiales d’un autre genre de territoire.
Toute fois les normes canoniques elles-mêmes laissent ouvertes la possibilité pour une conférence « d’être exigée pour un territoire plus ou moins étendu, de telle sorte qu’elle comprenne seulement les évêques de certaines églises particulières constituées dans le territoire donné ou les chefs des Eglises particulières situées dans des nations différentes » [5](Can 448).On en déduit qu’il peut y avoir des conférences épiscopales également à un autre niveau territorial, ou au niveau supranational.
Le jugement sur les situations des personnes ou les circonstances qui suggèrent une ampleur plus grande ou plus réduite du territoire d’une conférence est réservé au Siège apostolique : Le code nous l’affirme avec clarté : « Il revient à la seule Autorité Suprême de l’Eglise, après qu’elle a entendu les évêques concernés, d’ériger, de supprimer au de modifier les conférences des évêques »[6]. Du fait de leur érection elles jouissent de la personnalité juridique.
4)      La composition des Conférences
Chaque conférence doit comprendre tous les évêques diocésains du territoire et ceux qui leur sont équiparés par le droit, ainsi que les évêques coadjuteurs, les évêques auxiliaires et les autres évêques titulaires qui exercent dans ce territoire une charge spéciale confiée par le siège apostolique ou par la conférence elle-même (canon 450).
Dans les réunions plénières de la conférence épiscopale, les évêques diocésains et ceux qui leur sont équiparés par le droit, ainsi que les évêques coadjuteurs, ont voix délibérative, et cela de par le droit lui-même : « le suffrage délibératif dans les assemblées plénières de la conférence des évêques revient de plein droit aux évêques diocésains ainsi qu’à ceux qui leur sont équiparés en droit, et également aux évêques coadjuteurs [7]» (Can 454).
 Le président et le vice président,  nous dit le conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs dans « Utrum Episcopus Auxiliaris » « qu’ils doivent être choisis seulement parmi les membres qui  sont les évêques diocésains »[8].

En ce qui concerne les évêques auxiliaires et les autres évêques titulaires de la conférence épiscopale, c’est aux statuts de la conférence qu’il revient de déterminer si leur voix est délibérative ou consultative. C’est dans ce sens que le code stimule que : « Aux évêques auxiliaires et autres évêques titulaires qui font partie de la conférence des Evêques appartient le suffrage délibératif ou consultatif selon les dispositions des statuts de la conférence ; il demeure cependant que, lorsqu’il s’agit d’élaborer ou de modifier les statuts, seuls ceux dont il s’agit au paragraphe un ont suffrage délibératif »[9].
Le pape Jean Paul II dans Apostolos Suos marque l’importance de faire participer les évêques émérites : « Il convient par ailleurs que les statuts des conférences épiscopales prévoient la présence des évêques émérites avec voix consultative. On sera notamment attentif à les faire participer à certaines commissions d’étude, lorsqu’elles traient de sujets pour lesquels un évêque émérite a une compétence particulière »[10]. Il faut aussi noter que la participation d’un membre de la conférence ne peut être déléguée. Mais toutefois on peut y avoir des invités selon le droit.
5)      Le fonctionnement
« Chaque conférence épiscopale a des statuts propres, qu’elle élabore elle-même. Toutefois, ces statuts doivent obtenir la reconnaissance du siège apostolique ; dans ces statuts, il faut prévoir entre autres la tenue de l’assemblée plénière de la conférence, et pouvoir au conseil permanent des évêques et au secrétariat général de la conférence, ainsi qu’aux autres fonctions et commissions qui, au jugement de la conférence, favoriserons le mieux le but à poursuivre »[11].
C’est pour dire que les statuts reconnus sont un outil important qui définit le fonctionnement de la conférence, car ils déterminent la structure organique de la conférence, en établissant les organisations qui lui sont nécessaires pour remplir sa mission et en déterminant sa composition, ses attributions et ses procédures d’action. Ses différents organes sont : l’assemblée plénière, le conseil permanent des évêques, le secrétariat  général, des commissions et certains services.
L’assemblée plénière se réunit au moins une fois par an et jouit d’un pouvoir de décision. Elle avec le comité permanent sont présidés par le président de la conférence.
 La conférence jouit du pouvoir législatif. L’actuel code prône la mis en pratique du principe de subsidiarité. A ce niveau, la conférence porte des décrets généraux qui sont proprement des lois Cf. C 29 SS. Le siège a apostolique peut demander à la conférence de légiférer sur un point déterminé : c’est l’exemple du Can qui dit : c’est l’exemple du Can 230 qui dit : « Les laïcs hommes qui ont l’âge et les qualités requises établies par décret de la conférences des évêques, peuvent être admis d’une manière stable par le rite liturgique prescrit aux ministères de lecteur et d’acolyte ; cependant ,cette collation de ministère nec leur confère pas le droit à la subsistance ou à une rémunération de la part de l’Eglise »[12].     Pour illustrer une telle affirmation nous pouvons citer l’exemple de lac CENCO (Conférence Episcopale Nationale du Congo) qui a inséré dans la pastorale des laïcs les ministres auxiliaires communion et aussi lames responsables des paroisses. De surcroit il faut mentionner la charge de choisir ses délégués pour le synode des évêques, de dresser la liste des prêtres épiscopales et d’établir le programme de la formation sacerdotale.
 Il revient au secrétariat général d’établir ou de rédiger les rapports des actes et des décrets de l’assemblée plénière de la conférence et des actes du comité permanent ; de les communiquer aux membres de la conférence. Le canon 458 nous explique plus clairement sur la charge du secrétariat général en ces termes : Il revient au secrétariat général : «  de rédiger les rapports des actes et des décrets de l’assemblée plénière de la conférence ainsi que des actes du conseil permanent des évêques et de les communiquer à tous les membres de la conférence, de dresser aussi les autres actes dont la rédaction lui a été confiée par le président de la conférence ou par le conseil permanent »[13] et le paragraphe d’étendre la communication de ces actes aux conférence : Le secrétariat général doit «  communiquer aux conférences voisines, les actes et documents que la conférence en assemblée plénière ou  le conseil permanent des évêques ont décidé de leur transmettre [14]»
Nous jugeons nécessaire de donner une petite définition de ce que l’on appelle par conseil permanent dans la conférence : Le conseil permanent, formé des évêques, est un organe essentiel de la conférence, élu par la conférence et qui a pour taches de veiller à la préparation des affaires à traiter en assemblée plénière et à la mise en exécution des décisions prises. Il est ainsi l’organe exécutif et de  contrôle, qui veille à la publication des actes, traite des affaires courantes, décide en cas d’urgence.
A la lumière de tout ce qui précède nous pouvons dire que les taches des conférences épiscopales pour le bien de l’Eglise sont actuellement nombreuses. Elles sont destinées à favoriser, par une aide qui se développe «  la responsabilité inaliénable de chaque évêque à l’égard de l’Eglise universelle et de son Eglise particulière »[15]. C’est pour dire que lorsqu’ils abordent des questions nouvelles et qu’ils font en sorte que le message du Christ éclaire et guide la conscience des hommes pour résoudre les problèmes nouveaux suscités par les mutations de la société, les évêques réunis dans la conférence épiscopale exercent ensemble leur fonction doctrinale, bien conscients de limites de leurs déclarations ,qui n’ont pas le caractère d’un magistère universel, tout en état officiel et authentique et en communion avec le Siège apostolique. C’est pourquoi ils doivent éviter de gêner l’œuvre doctrinale des évêques d’autres territoires, compte tenu des répercutions dans des zones plus vastes, et même dans le monde entier.
Comme prévu dans le n° 753 CIC, que le magistère authentique des évêques c’est à dire celui qu’ils exercent revêtus de l’autorité du Christ, doit toujours être en communion avec le chef du collège et avec ses membres, si les déclarations doctrinales des conférences épiscopales sont approuvées à l’unamité, elles peuvent sans aucun doute être publiées au nom des conférence-elles-même, et les fidèles sont tenus d’adhérer avec une révérence religieuse de l’esprit à ce magistère authentique de leurs évêques. Mais si cette unamité n’a pas été obtenue, la seule majorité des évêques d’une conférence ne peut publier une éventuelle déclaration comme magistère authentique de cette conférence, à laquelle devraient adhérer tous les fidèles du territoire, à moins qu’elle n’ait obtenu la reconnaissance du siège apostolique.
C’est ainsi que l’évêque gardant toujours sa compétence diocésaine, a besoin lui aussi de collaborateurs en vue d’une bonne organisation au sein de son Eglise particulière.
 II- Organisation interne des Eglises particulières
1)      Le Synode diocésain
Il est d’une vieille tradition ecclésiale initié par le pape Sirice vers les années 387 à Rome. C.D n°36,2 revalorise cette institution qui commençait à tomber en désuétude car elle est l’expression significative de la communion diocésaine ;  expression de coresponsabilité, du pouvoir de gouvernement de l’évêque.
.Notion, but et finalité
Le synode diocésain est une assemblée des délégués du clergé diocésain et des autres fidèles d’une Eglise particulière. Son but est d’apporter une collaboration, un soutien à l’évêque diocésain dans sa charge pastorale et d’étudier les problèmes surtout spirituels concernant l’Eglise diocésaine.
Le directoire des évêques en ministère pastoral, au numéro 163 résume l’objectif du synode diocésain en quatre points :
1°) appliquer à une situation locale la doctrine et la discipline de l’Eglise Universelle.
2°) édicter des règles pour l’action pastorale.
3°) corriger, en cas de besoin, des erreurs ou des vices existants.
4°) assumer la responsabilité commune dans l’édification du peuple de Dieu.
Ce qui est visé dans ces points, c’est le bien de la communauté diocésaine et  la promotion de la vie chrétienne. Le canon 460 nous le décrit : « le synode diocésain est la réunion des délégués des prêtres et des autres fidèles de l’Eglise particulière qui apportent leur concours à l’Evêque diocésain pour le bien de la communauté diocésaine tout entière »[16].   

.célébration du synode
            Contrairement à L’ancien code, qui avait fixé sa célébration après chaque dix ans, le nouveau code quant à lui laisse au jugement de l’Evêque d’une Eglise particulière de voir son bien fondé, son importance, sa nécessité, après avoir obtenu le consentement du conseil presbytéral, et lors que les circonstances le suggèrent. Celui qui a à sa charge plusieurs diocèses peut convoquer un seul synode pour tous les diocèses : pour une précision, nous citons le canon 461 : « le synode diocésain sera célébré dans chaque Eglise particulière lors que, au jugement de l’Evêque diocésain et après que celui-ci ait entendu le conseil presbytéral, les circonstances le suggéreront ». Et le paragraphe 2 ajoute : « si un Evêque a la charge de plusieurs diocèses, ou s’il a la charge de l’un comme Evêque et d’un autre comme Administrateur, il peut, de tous les diocèses qui lui sont confiés, convoquer un seul synode diocésain »[17].
. Autorité compétente dans la convocation et la présidence.
            Seul l’Evêque diocésain est habilité à convoquer le synode diocésain et à le présider. Cependant il peut, pour chacune des sessions, le déléguer à un vicaire général ou épiscopal : « seul l’Evêque diocésain convoque le synode diocésain, mais non pas celui qui gouverne le diocèse par intérim »[18]. Et le paragraphe 2 de dire : « l’Evêque diocésain préside le synode diocésain ; il peut cependant, pour chacune des sessions du synode, déléguer le vicaire général ou un vicaire épiscopal pour remplir cet office »[19]. Il faut noter que le rôle reconnu à l’Evêque est prépondérant, il est le président du synode mais surtout il est le seul et l’unique législateur.
. Les membres
            On distingue les membres de droit, les membres convoqués et les invités comme observateurs.
·         Les membres de droits : ce sont ceux qui doivent y participer en raison des offices qu’ils assument. Ils sont :

1)      L’Evêque coadjuteur et les Evêques auxiliaires.
2)      Les vicaires généraux et les vicaires épiscopaux, ainsi que le vicaire judiciaire.
3)      Les chanoines de l’Eglise cathédrale.
4)      Les membres du conseil presbytéral.
5)      Des fidèles laïcs mêmes membres d’instituts de vie consacrée, à élire par le conseil pastoral, de la manière et en nombre à déterminer par l’Evêque diocésain, ou bien, là où ce conseil n’existe pas, selon les dispositions établies par l’Evêques diocésain.
6)      Le recteur du grand séminaire.
7)      Les vicaires forains.
8)      Au moins un prêtre de chaque vicariat forain, à élire par tous ceux qui y ont charge d’âmes ; un autre prêtre, qui le remplacera en cas d’empêchement, devra être élu.
9)      Des supérieurs des instituts de vie religieuse des sociétés de vie apostolique qui ont une maison dans le diocèse, à élire en nombre et de la manière fixée par l’Evêque diocésain. 
·         Les membres convoqués : peuvent aussi être appelés au synode diocésain, par l’Evêque diocésain comme membres du synode, d’autres personnes, clercs, membres de vie consacrée ou laïcs.
·         Les invités comme observateurs : s’il le juge opportun, l’Evêque diocésain peut inviter au synode comme observateurs des ministres ou des membres d’Eglises ou de communautés ecclésiales qui ne sont pas en pleine communion avec l’Eglise catholique.
. Dispositions pratiques (464-468)
En cas d’empêchement à la participation au synode, il faut :
-          Avertir l’évêque diocésain.
-          Ne pas envoyer une personne pour assister à son nom.
Et aussi toutes les questions proposées seront soumises à la libre discussion des membres lors des sessions synodales ; l’Evêque diocésain seul est l’unique législateur. Il signe seul les déclarations et les décrets à publier sous son autorité. Les autres membres n’ont que voix consultative. L’Evêque diocésain communique les actes du synode au métropolitain et à la conférence des Evêques. En cas d’empêchement ou de vacance du siège épiscopal, le synode diocésain est suspendu jusqu’à la décision du nouvel Evêque successeur qui décidera de la poursuite ou de la fermeture totale.
Ces dispositions pratiques  nous éclairent sur la prépondérance et l’importance du rôle de l’Evêque en ce qui concerne le synode diocésain. Elle aide aussi à voir la communion et la collaboration des Eglises particulières autour de leur Evêque.
2)      La curie diocésaine
            A l’exemple de la curie Romaine pour le Pape, la curie diocésaine est un instrument principal de l’Evêque diocésain pour le gouvernement de son diocèse. La curie est définie selon le canon 469 comme « l’ensemble des organismes et des personnes qui prêtent leur concours à l’Evêque dans le gouvernement du diocèse tout entier, surtout dans la direction de l’action pastorale, dans l’administration du diocèse, ainsi que dans l’exercice du pouvoir judiciaire »[20]. En d’autres termes, elle est l’ensemble d’organismes et de personnes, clercs ou laïcs qui aident l’Evêque dans la conception, l’élaboration et la réalisation de toutes les initiatives apostoliques  du diocèse. Ainsi on comprend que sa finalité est d’aider l’Evêque dans le gouvernement de son diocèse, dans les domaines pastoral, administratif et judiciaire.
           
La composition de la curie diocésaine comprend :
a)      Des personnes ou offices : vicaires généraux ou épiscopaux ; chancelier et notaire ; vicaire judiciaire et juges ; l’économe et le conseil pour les affaires économiques.
b)      Organes ou institutions : le conseil presbytéral ; le collège des consulteurs ; le conseil pastoral ; le chapitre des chanoines, le tribunal, le conseil épiscopal.
. Les nominations
            La nomination des détenteurs des divers offices de la curie relève exclusivement de l’Evêque diocésain conformément au canon 157 qui prévoit : « sauf autre disposition explicite du droit, il revient à l’Evêque diocésain de pourvoir par libre collation aux offices ecclésiastiques dans sa propre Eglise particulière [21]». Pour la nomination de l’économe, l’avis du conseil pour les affaires économiques et du collège des consulteurs est vivement recommander selon le canon 494 : «  dans chaque diocèse l’Evêque, après avoir entendu le collège des consulteurs et du conseil pour les affaires économiques, nommera un économe vraiment compétent dans le domaine économique et remarquable par sa probité [22]». Il est élu pour une durée de cinq ans renouvelable.
. Les obligations des membres
            Leur obligation est d’accomplir leurs fonctions avec fidélité et dans le respect de la confidentialité.  Toutes les personnes qui reçoivent un office à la curie doivent :
1)      Promettre d’accomplir fidèlement leur charge selon la règle fixée par le droit ou par l’Evêque ;
2)      Garder le secret dans les limites et selon les modalités fixées par le droit ou par l’Evêque.
. Les dispositions intérieures de la curie
            Même si la curie est unique dans son fonctionnement, on peut distinguer deux directions fondamentales :
 La direction administrativo-pastorale pour laquelle il faut se référer aux normes de ce chapitre et la direction judiciaire pour laquelle il faut observer les normes du livre VII sur les procès. (cf. canon472).
. La coordination interne des activités  
            Il y’a plusieurs bureaux, charges, fonctions, attributions, services, organes, personnes mais tous poursuivent un seul et même but : le bon gouvernement du diocèse, l’efficacité dans l’organisation et le bien des âmes. C’est dans ce sens que le canon 473§1 affirme : « l’Evêque diocésain doit veiller à ce que toutes les affaires qui concernent l’administration du diocèse tout entier soient convenablement coordonnées et organisées afin d’assurer le mieux possible le bien de la portion du peuple de Dieu qui lui est confiée [23]». Il faut aussi noter que ces activités sont coordonnées par l’Evêque afin d’éviter l’anarchie. Il devra veiller plus à la coordination des activités pastorales de ses plus proches collaborateurs (vicaires général et épiscopal). L’Evêque peut aussi nommer un modérateur de la curie dans le but de coordonner l’activité administrative de la curie et de veiller au bon fonctionnement et aux rapports des différents bureaux. Sauf autre disposition du droit, le vicaire général sera nommé modérateur. (cf. canon 473§2-3).
            Quant au conseil épiscopal, il sera composé de l’Evêque, du vicaire général et des vicaires épiscopaux. Il sert à favoriser davantage l’action pastorale. Seul l’Evêque a le pouvoir de gouvernement ; tandis que les autres exercent une fonction consultative. Mais il peut confier au vicaire général ou épiscopal l’exécution, l’émanation, la promulgation d’une décision du conseil.
. Les actes de la curie
            Pour avoir un effet juridique «  ad validitatem », les actes de la curie doivent être écrits et signés par l’ordinaire dont ils émanent. Ils porteront aussi la signature du chancelier de la curie ou d’un auteur qui les fera connaître au modérateur : « les actes de la curie destinés à avoir effet juridique doivent être signés par l’ordinaire dont ils émanent, et ceci pour la validité, et en même temps par le chancelier de la curie ou par un notaire ; mais le chancelier doit faire connaître les actes au modérateur de la curie [24]».can 474. Ces actes sont : nomination, incardination, décisions épiscopales, concession d’une dispense matrimoniale, attribution d’une paroisse. Il convient de préciser que l’Evêque ne fait pas partie de la curie diocésaine.


II-2-1 Les personnes titulaires des offices de la curie.
A)    Les vicaires généraux ou épiscopaux.
Le vicaire général est un prêtre, muni du pouvoir ordinaire exécutif, qui aide de manière stable l’Evêque dans le gouvernement pastoral dans tout le diocèse. Son institution est obligatoire et il ne doit y avoir qu’un seul vicaire général dans le diocèse sauf autre disposition du droit ou de l’Evêque : « dans chaque diocèse un vicaire général doit être constitué par l’Evêque diocésain : muni du pouvoir ordinaire(…), il aide l’Evêque lui-même dans le gouvernement du diocèse tout entier. En règle générale un seul vicaire général sera constitué, à moins que l’étendue du diocèse ou le nombre d’habitants ou d’autres raisons pastorales ne conseillent autre chose [25]».
Le vicaire épiscopal, dont l’institution est facultative et laissé à la discrétion de l’Evêque diocésain, a la même fonction et le même pouvoir que le vicaire général mais ne s’exerce que dans une zone de circonscription diocésaine, dans un secteur pastoral bien déterminé ou pour une catégorie spécifique de personnes. C’est à l’Evêque de définir la compétence de chaque vicaire épiscopal pour éviter la confusion : « chaque fois que le bon gouvernement du diocèse le demande, un ou plusieurs vicaire épiscopaux peuvent être constitués par l’Evêque diocésain : ils possèdent alors pour une partie déterminée du diocèse, ou pour une certaine catégorie d’affaires, ou bien pour des fidèles d’un rite déterminé ou appartenant à un groupe de personnes donné, le même pouvoir ordinaire que le droit universel accorde au vicaire général [26]».
. Modalités pour la nomination      
            Ils sont librement nommés par l’Evêque. Pour des causes justes, il peut les révoquer en observant les principes de l’équité et de la justice (cf. Canon 406). Si le diocèse a un Evêque coadjuteur ou auxiliaire, il sera institué vicaire général pour un temps indéterminé. Le vicaire général peut être nommé pour un temps déterminé ou indéterminé. Mais le vicaire épiscopal le sera pour un temps bien déterminé (le minimum est de  trois ans). En leur absence ou s’ils sont légitiment empêchés, l’Evêque peut nommer un autre vicaire suppléant dit pro-vicaire.
.Qualités requises pour la nomination
            Ils doivent être :
a)      Prêtre âgé de 30ans au minimum.
b)      Docteur ou licencié en droit canonique ou en théologie.
c)      Etre digne de foi par la saine doctrine.
d)     Pas être consanguin à l’Evêque jusqu’au quatrième degré.
L’office cesse par :
a)      La fin du mandat.
b)      Par une démission acceptée.
c)      Par révocation (pas pour celui qui est Evêque).
d)     Quand le siège épiscopal devient vacant.
B)    Le conseil presbytéral
C’est un groupe de prêtres représentant le presbyterium, c’est comme le sénat de l’Evêque. Il assiste et aide l’Evêque dans la triple fonction d’enseigner, de sanctifier et de gouverner, pour exprimer la communion des prêtres et la coopération de tous au gouvernement. Son but ultime est de promouvoir de manière efficace le bien pastoral du diocèse. Il est composé des membres élus et des membres nommés par l’Evêque.
C)    Le collège des consulteurs
Il procède du conseil presbytéral. C’est un organe restreint avec des fonctions propres et spécifiques exercées en toute indépendance du conseil presbytéral. Il est constitué de prêtres choisis librement par l’Evêque diocésain.ils doivent varier de six à douze et dont le mandat est de cinq ans. La vacance du siège épiscopal n’entraine pas ipso facto sa dissolution. Quand le siège est interdit ou vacant, il lui revient d’assurer provisoirement la fonction présidée par l’Evêque et il doit élire l’administrateur diocésain dans les limites du temps impartis (dans les huit jours à partir de la vacance du siège) (cf. canon 502).
II-2-2 Les paroisses, les curés, et les vicaires paroissiaux.
A)    La paroisse
La paroisse est une communauté déterminée de fidèles, établie de manière stable au sein de l’Eglise particulière. Elle est dirigée par un curé député par l’Evêque diocésain. D’une manière générale, la paroisse doit être dans un territoire bien circonscrit. A défaut d’une  paroisse on peut avoir des quasi-paroisses ou des communautés ecclésiales. Seul l’Evêque diocésain peut ériger, supprimer ou modifier des paroisses ; mais tout en consultant le conseil presbytéral. Une paroisse légitiment érigée jouit de la personnalité juridique et doit bien gérer son patrimoine.
B)    Le curé
            Il est le prêtre qui a la charge d’une paroisse en qualité de pasteur propre qui lui est confiée par l’Evêque diocésain. Il est collaborateur de la charge pastorale de l’Evêque. Il exerce la charge pastorale d’enseigner, de sanctifier et de gouverner (cf. canon528-529). Il collabore avec d’autres prêtres ou diacres et des laïcs.
Pour être curé il faut des qualités requises : « pour que quelqu’un soit désigné validement curé, il faut qu’il soit constitué dans l’ordre sacré du presbytérat. Il sera de plus remarquable par sa saine doctrine et ses mœurs intègres, mû par le zèle apostolique et doté d’autres vertus, et il possédera en plus les qualités requises par le droit universel ou particulier pour la charge pastorale dont il s’agit. Pour confier à quelqu’un l’office de curé, il faut s’assurer de son idonéité, de la manière fixée par l’Evêque diocésain, ne fût-ce par un examen »[27]. En ce qui concerne la stabilité du curé le canon 522 dit ceci : « le curé doit jouir de la stabilité et c’est pourquoi il sera nommé pour un temps indéterminé ; l’Evêque diocésain ne peut le nommer pour un temps fixé que si cela a été admis par un décret de la conférence »[28].
La désignation des curés est de la compétence de l’Evêque diocésain par libre collation à travers un décret de nomination. Mais pour un membre d’un institut de vie consacrée ou d’une société de vie apostolique, la nomination se fait après présentation du candidat par le supérieur à l’Evêque. (Cf. can682).
Cependant à cause de la pénurie de prêtres ou autres circonstances, l’Evêque peut confier plusieurs paroisses proches à un curé. Il peut aussi confier la charge pastorale d’une paroisse à un groupe de prêtres, en désignant un modérateur pour coordonner l’activité pastorale et en répondre devant lui : on parle de curé in solidum (cf. can 517§1).
La fonction du curé cesse avec la révocation ; le transfert ; la démission acceptée, en raison de l’âge (75ans).
C)    Le vicaire paroissial.
Le Vicaire Paroissial est un Prêtre collaborateur (coopérateur) du Curé. Il est institué pour aider le Curé dans toutes les tâches paroissiales. Son institution dépendra des nécessités de la paroisse selon le jugement de l’Evêque.
            Le Vicaire paroissial est nommé librement par l’Evêque après avoir entendu, s’il le juge opportun, le Curé de la paroisse proposée et le vicaire forain, restant sauves les dispositions du Can. 682, §1, Quand il s’agit d’un religieux  ou membre d’une  société de vie apostolique.  (Can. 547).
            Le Vicaire paroissial peut être constitué:
- pour toute la paroisse,
- pour une certaine catégorie de fidèles,
- pour une portion de la paroisse,
- pour un ministère précis dans plusieurs paroisses ressemblées,
            Il ressort surtout ces obligations: la résidence, la vie commune (can. 280), la coopération et la bonne entente, le remplacement (la suppléance) dans le cas échéant selon le droit (vicaire substitut: remplacer le curé pendant son absence).
            Le Vicaire paroissial peut être déchargé, pour une juste cause, par l’Evêque diocésain ou l’Administrateur diocésain, restant sauves les dispositions du Can. 682,§2 (Can. 552).
            Le Vicaire paroissial est absolument amovible, on n’a pas besoin de consulter le Curé ou le Vicaire Forain. Pour le Vicaire paroissial religieux, il est un peu moins amovible puisque l’Evêque diocésain est obligé d’aviser son supérieur.
             
D)    Le vicaire forain.
Selon la structure de l’organisation pastorale en cours au sein de l’Eglise, le diocèse est divisé en paroisses, les paroisses voisines peuvent s’unir dans les regroupements particuliers dénommés Vicariat Forain ou doyenné ou (archiprêtré).
            La charge du vicariat forain revient au Vicaire Forain appelé aussi doyen ou archiprêtre.
La figure du Vicaire Forain remonte du IVème siècle et elle s’est affirmée en particulier au IXème siècle. Dans le passé, l’office du Vicaire Forain était annexé de manière stable à une paroisse déterminée. Ce critère a été abrogé (Cfr. ES.I n°. 16) . Le CIC-83 le confirme en son canon 554.
« §1. Pour l’office de vicaire forain, lequel n’est pas lié à celui d’une paroisse déterminée, l’Evêque diocésain choisira un prêtre qu’il aura jugé idoine, en tenant compte des circonstances de lieux et de temps.
§2. Le vicaire forain est nommé pour un temps déterminé fixé par le droit particulier.
§3. Pour une juste cause, à son propre jugement, l’Evêque diocésain peut librement révoquer de sa charge le vicaire forain. »
            Le Vicaire Forain, dénommé aussi doyen ou archiprêtre est le prêtre chargé d’un Vicariat Forain. Sa nomination revient librement  à l’Evêque, après avoir entendu, s’il le juge nécessaire, des Prêtres exerçant le ministère dans ce vicariat forain.
            Il est nommé pour un temps déterminé (ad certum tempus) défini par le droit particulier. Pour une juste cause, le Vicaire Forain peut être révoqué librement par l’Evêque selon une prudente décision. A la fin du mandat, il peut être reconfirmé, après avoir entendu - pro suo prudenti iudicio - les Prêtres diocésains et les religieux œuvrant dans la zone.
            Pour être nommé doyen, il faut:
-          être un Curé,
-          être un simple Prêtre,
-          être un membre du clergé diocésain
-          être un membre d’un Institut de vie consacrée / clérical œuvrant dans le diocèse,
-          être un Prêtre en pleine activité pastorale ayant une expérience directe des problèmes paroissiaux,
-          avoir un grand esprit de disponibilité et d’ouverture,
-          jouir d’une grande estime et de la confiance de ses confrères,
-          avoir sa résidence dans le vicariat forain.

            Le Vicaire Forain a le droit et le devoir:
-          de promouvoir et de coordonner l’activité pastorale commune dans le vicariat forain ou doyenné (ministère pastorale)
-          de veiller à ce que les clercs de son doyenné mènent  une vie conforme à leur état et accomplissent avec zèle leur devoir (discipline de vie et du travail)
-          de veiller au respect des règles liturgiques dans les célébrations (fonctions) liturgiques; de Veiller au respect et à la propreté des Eglises (lieu de culte), du mobilier et des objets sacrés (surtout hors de la célébration de l’Eucharistie et la garde (conservation) du saint sacrement; de veiller à la bonne tenue des registres paroissiaux, à la saine administration des biens ecclésiastiques et enfin veiller au bon état du presbytère.    

                                         Conclusion


En définitive, notre travail a été effectué par un regard panoramique de ce que le code de droit canonique prévoit pour les conférences des évêques et puis pour l’organisation interne des Eglises particulières. Ces deux grands organes nous ont permis d’avoir une idée plus approfondie de ce qu’est la hiérarchie, la structure de l’Eglise catholique, de son objectif et surtout de son fonctionnement. C’est ainsi que nous voyons le code de droit canonique comme l’enseignement du Christ réalisé, établi en normes, en règles, dans la mesure où il permet à l’Eglise tout entière de comprendre que chacun a et aura toujours une charge au sein de la communauté. C’est pour cela que les personnes ayants des offices, charges ou fonctions doivent se considérer simples et humbles serviteurs du Christ. En ce qui nous concerne nous pouvons dire que, les parties traitées dans notre recherches, nous montrent que toute institution mini qu’elle soit nécessite une structuration afin d’y faire régner l’harmonie, la vérité et surtout la fidélité aux consensus, aux exigences d’où : «  pacta sunt servanda ».


















Bibliographie
Cité du Vatican, Code de Droit Canonique, bilingue, 1983.
JEAN PAUL II, Lettre Apostolique Apostolos Suos en Forme de Motu Proprio Sur la
                            Nature théologique et juridique des conférences des Evêques dans D.C,
                             2188(1998), p751-759.
Vatican II, Les Seize documents conciliaires, Texte intégral. MARTIN P. A (Dir) Québec,
                    Fides, 2001.
PAGE Roch, Les Eglises Particulières, T.I, La Charge Pastorale de leurs communautés de  
                       Fidèles selon le code de droit canonique de 1983, Paris et Montréal, e.d.
                        Paulines et Médiaspaul, 1989,229p.
PARALIEU R., Guide Pratique du code de droit canonique. Notes pastorales, Paris,
                             Tardy, 1985.



[1] L.G n°18
[2] C.D n°37/ L.G n°23.
[3] Can 447
[4] C.D n°37
[5] Can 448
[6] Can 449
[7] Can 454
[8] Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs, in Utrum Episcopus auxiliaris
[9] Can 450.
[10] Jean Paul II, apostolos suos in documentation catholique n°2188, sept. 1998.
[11]Can 451.
[12] Can 230
[13] Can 458§1
[14] Can 458§2
[15]  Assemblée générale extraordinaire du synode des Evêques, (1985), rapport final, II, C, 5 : doc. Catholique t.83(1986), p.40. 
[16] Can 460
[17] Can 461 §1&2
[18]  Can 462§1
[19]  Can 46
[20]  Can 469
[21] Can 157
[22] Can 494
[23] Can 473 §1
[24] Can 474
[25] Can 475§1-2.
[26] Can 476
[27] Can 521 §1-2.
[28]  Can 522.