jeudi 13 décembre 2012

les femmes


Les conditions dans lesquelles vivent les femmes dans le monde ont toujours été préoccupantes. Malgré leur rôle essentiel dans la famille et la société toute entière, elles sont victimes des inégalités, des injustices et des violences qui portent atteinte à leur identité profonde et qui réduisent leur dignité à sa plus simple expression. Aussi, faut-il connaître avec Porcile Santiso qu’un regard objectif sur l’histoire de l’humanité oblige à constater que la femme a été généralement considérée comme inférieure, soumise à l’homme et utilisée pour lui, surtout ou uniquement, pour la procréation et les travaux ménagers[1].

Les biblistes du XXe siècle ont vu en la Bible, dans la société occidentale, une source majeure et une légitimation de l’oppression des femmes dans la famille, la société et l’Eglise.[2] Elles remarquent que l’ehos  chrétien est totalement andocentrique( c’est-à-dire centré sur le mâle), patriarcal(c’est-à-dire dominé par le mâle) et sexiste( c’est-à-dire discriminatoire et oppresseur à l’égard des femmes). La réaction des femmes chrétiennes en général et les biblistes en particulier, ayant constaté le rôle de la Bible dans l’oppression des femmes, a été de refuser  que la Bible serait elle-même à la blâmer. Si la Bible est Parole de Dieu, elle ne peut être nuisible à aucune des créatures de Dieu. La faute doit revenir à une mauvaise interprétation du texte.[3]

Force est de remarquer que cette discrimination a été entretenue par à peu près toutes les cultures et à toutes les époques de l’histoire. Les pères synodaux de 1994 attribuent la condition d’infériorité de la femme en Afrique à la tradition africaine non encore été complètement transformée par l’Evangile.

Pendant que certaines femmes éclairées poursuivent la lutte pour défendre la dignité de la femme, « avec l’espoir qu’elle sera pleinement reconnue »[4] un jour,  nombreuses sont les femmes dans le monde, particulièrement en Afrique et plus précisément  dans les pays en guerre, tel la République Démocratique du Congo, qui subissent des violences ignominieuses et « innommables ». Madame Marie Madeleine KALA, dans la préface de l’ouvrage de la sœur Josée NGALULA, Dieu dénonce et condamne les violences faites aux femmes, parle des formes des violences plus atroces et plus spectaculaires, telles que les violences sexuelles, déportations et esclavages sexuels, éventrement, mariages forcés, mutilations, etc., crimes abominables, car laissant des traces indélébiles et ruinant la vie.

En laissant parler le témoignage de cette femme nommée Destinée, victime des ces genres de violences, nous pouvons nous rendre compte de la gravité de la situation que traversent les femmes dans le monde. La sensibilité de ce message a obligé sa lectrice à tourner le dos contre ses auditeurs : 

« J’ai laissé mon histoire à la génération future, je voudrais qu’un jour les femmes se souviennent de mon courage et qu’elles luttent pour que ce que j’ai vécu, aucune autre femme au monde ne puisse le vivre. « Maman Destinée. »

C’était un samedi matin, je me suis réveillée comme à la normale. Je suis allée prendre du bois derrière la maison et de là, j’ai entendu une voix en swahili qui m’a interpellée en disant " Femme ! Arrêtes- toi" je me suis arrêtée et j’ai vu un groupe de soldats habillés en tenue de combat, ils étaient plus d’une dizaine, ils ont commencé à avancer vers moi, j’ai commencé à trembler car au fond de moi, je me suis dit « Voilà aujourd’hui c’est mon tour. ». Saisi de peur, mon corps devenait lourd comme une pierre. Ils m’ont demandé qui étaient dans la maison, j’ai répondu que toute ma famille était à l’intérieur de la maison. Celui qui avait l’air d’être le commandant m’a demandé d’aller avec eux à l’intérieur de la maison, et là, mon mari, mon beau-père, mon fils et mes deux filles s’y trouvaient. Ils m’ont ordonné de me coucher par terre et exigé que mon fils me fasse l’amour, sinon j’allais être tuée. Mon beau-père, surpris et choqué par cette parole barbare, répondit Non, et on lui répliqua par un coup de crosse de fusil à la tête. Après, on l’obligea à son tour à coucher avec ma fille aînée bien aimée, il répliqua forcément Non ! Et il a été abattu sur le champ ! A mon mari, il fut ordonné de coucher avec ma fille et il refusa, mon fils qui refusa aussi de coucher avec moi fut mis au coin du mur, alors leur commandant ordonna à tous les autres militaires de se mettre en file, mon mari fut couché par terre pour servir de matelas. Les 15 militaires passèrent sur moi à tour de rôle et je fus laissée pour morte une fois cette horreur terminée. A la fin, mon mari et mon fils furent tués l’un après l’autre et mes filles furent violées à leur tour.

Faible à mourir, le commandant ordonna que je sois transportée et partir avec eux. Nous sommes alors partis très loin dans la forêt où, j’ai servi de femme esclave et de bonne à tout faire. Après un temps que je peux imaginer de 2 à 3 mois, j’ai réussi à m’enfuir avec un tissu en pagne pour cacher ma nudité qui ne me servait plus à rien car toute ma dignité de femme était déjà finie. Je me suis retrouvée dans un petit village près de l’Ituri après avoir bravé pluie, soleil, froid, serpents, moustiques, maux de têtes etc.… Je me suis retrouvée à Kinshasa où quelques jours après j’ai été prise en charge par l’hôpital général de Kinshasa. » Cette femme mourra sur son lit d’opération.[5]

Les violences faites aux femmes n’ont pas commencé aujourd’hui. Elles sont vielles que le monde. La Bible en fait largement mention. La sœur Josée NGALULA, dans le livre sus-cité, fait découvrir au lecteur les violences faites aux femmes dans la Bible ainsi que les pistes chrétiennes pour lutter contre ces violences.[6]  Elle insiste sur l’attitude de Dieu face aux violences : Il dénonce la violence et exige son arrêt.[7]

Lorsqu’on examine la plupart de ces violences, anciennes comme actuelles, l’on remarque que presque tout se joue sur le corps de la femme. Sa beauté et sa virginité sont mises en jeu ou alors en épreuve. Or, l’on sait que ce qui est commun à toutes les femmes c’est le corps. C’est à travers celui-ci qu’elles s’expriment, c’est là, comme le dit Porcile Santiso: « la première identité de l’être de l’être féminin ; une corporéité féminine qui implique une façon d’être dans le monde, de se situer (de là le terme de « situation »), qui suppose une façon d’être et de se définir. »[8] Certes, le corps exprime la personne. Il n’est pas seulement un objet de ce monde mais fondamentalement, quelqu’un, la manifestation, le langage d’une personne.[9]



[1] SANTISO  P., La femme, espace de salut, Paris, Cerf, 1999, p. 27.
[2] SANDRA  M.,  Le texte de la rencontre.  Lectio Divina 161, Paris, cerf, 1995, p. 228.
[3] Cf. Ibidem, p. 229.
[4]
[5] http://www.genreenaction.net/spip.php?article3772 lundi 28 novembre 2005. 
 
[6] NGALULA J., Dieu dénonce et condamne les violences faites aux femmes, p. 6.
[7] Ibidem, p. 9.
[8] SANTISO  P., Op. cit., p. 113-114.
[9] CLEMENT O., Corps de mort et de gloire. Petite introduction à une théopoétique du corps, Paris,       Desclée de Brouwer, 1995, p. 10.

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